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Immobilier de bureau : paris bulle-t-il ?

Les compteurs s'affolent sur le marché des bureaux. les immeubles tertiaires bien placés, bien conçus, bien loués, souvent parisiens, se vendent comme des petits pains. les enchères montent sur ces placements sûrs et encore un peu rentables.

par catherine sabbah journaliste chargée des dossiers immobilier aux « echos »

des milliards d'euros volent en formation serrée au-dessus de la france, et se déversent dans des immeubles de bureaux, des centres commerciaux, des hôtels... avec un total de 20 milliards d'euros, le marché devrait dépasser de près de 30 % le résultat de 2013. au palmarès 2014 : les galeries commerciales achetées à klépierre par carmila, la nouvelle foncière de l'enseigne carrefour, la tour coeur défense acquise par le fonds texan lone star, pour 1,2 milliard d'euros, le centre commercial beaugrenelle racheté par le patron d'apsys et ses deux associés pour plus de 700 millions, le siège de sfr à saint-denis, que predica a acquis pour plus de 500 millions... au total, le nombre de transactions de plus de 200 millions d'euros a augmenté d'au moins 50 % en un an. en plein marasme économique, la pierre ne ment pas. et ne trahit pas sa réputation de valeur refuge. « paris sera toujours paris », et une bonne partie du monde a les yeux rivés sur le parc de bureaux français, deuxième sur le podium européen après londres, et toujours nettement plus abordable que son voisin britannique. parmi les acheteurs aux portefeuilles bien garnis, des habitués et des nouveaux venus. les compagnies d'assurances françaises, poussées par les nouvelles normes de solvabilité à augmenter leur allocation en immobilier ; leurs homologues chinoises, autorisées depuis peu à passer leurs frontières ; des fonds souverains soucieux de mettre leurs actifs à l'abri dans des pays politiquement stables ; des fonds de pensions persuadés que la crise aura une fin ; des foncières qui font « tourner » leur patrimoine ; ou encore des « family offices » ou de riches industriels, capables de s'offrir un immeuble comme vient de le faire le brésilien safra, heureux nouveau propriétaire du « gherkin » à londres, payé 726 millions d'euros... l'immobilier demeure la classe d'actifs la plus sûre, même si, là aussi, les rendements se tassent. si la chute des loyers fut brutale dès 2008 sur le marché londonien, elle a été moins forte et dissimulée en france par le maintien de valeurs « faciales » hautes, compensées par des baisses de 20 à 30 % sous forme de gestes commerciaux... plutôt que de déménager, les entreprises ont préféré renégocier leurs baux. celles qui n'ont pas ce choix optimisent leurs coûts en négociant âprement des surfaces plus petites et moins chères. tous les acteurs admettent aujourd'hui que, en six ans, les loyers ont finalement perdu entre 25 et 30 % et ne montrent aucun signe de reprise. directement lié à l'emploi tertiaire, le nombre de mètres carrés de bureaux occupés par les entreprises diminue à mesure que le chômage augmente. il est probable que la mutation du travail tertiaire, de plus en plus mobile, aux espaces de plus en plus partagés, exigera aussi structurellement de moins en moins de surfaces.
comment alors, malgré la baisse des revenus locatifs, expliquer cet afflux de liquidités ? en différenciant l'analyse de deux marchés de plus en plus déconnectés. aux confins de la première couronne parisienne et plus loin, des bureaux désuets, dans des immeubles vieillots, souvent éloignés des transports en commun, n'intéressent pas grand monde sinon leurs propriétaires. ceux qui ont encore des locataires redoutent de les voir partir et que, vides, ces passoires thermiques plombent leurs comptes. près de 4 millions de mètres carrés (7,6 % du parc francilien) sont ainsi inoccupés depuis plus de quatre ans. il est possible que beaucoup ne trouvent plus jamais preneur. faut-il raser ces bâtiments dont la valeur se réduit à celle de leur terrain ? les transformer en logements ? sauf sur les marchés résidentiels tendus, l'opération est souvent une gageure technique et un gouffre financier.
aux antipodes de ce marché poussif, les investisseurs français et étrangers s'arrachent les quelques immeubles neufs bien conçus, bien placés et bien loués. certains prévoient même d'en construire de très grands, comme la très controversée tour triangle. les prix montent, au-delà même des valeurs d'expertise, notamment sous la pression des fonds d'investissement contraints d'acheter pour servir une rentabilité à leurs actionnaires. au point de faire fuir : le fonds allemand union investment, grand animateur du marché ces dernières années, a choisi de vendre et d'aller dépenser ses plus-values sous d'autres cieux. des institutionnels français ont préféré se retirer du marché, ne sachant ni où ni comment réinvestir.
cette surenchère et cette frénésie d'achats sont-elles les signes d'une spéculation ou d'une bulle inquiétante ? pour le marché de bureaux ? pour l'économie en général ? ce sursaut a surtout pour effet de remonter le moral de la profession, morose depuis plusieurs années, et ne semble pour l'instant inquiéter personne. d'abord, les immeubles resteront en france quels que soient leurs propriétaires ! les emplois que génèrent leur gestion et leur entretien aussi. ensuite, à situation nouvelle, analyse nouvelle : malgré la baisse des taux de capitalisation sous les 5 %, et compte tenu de la faiblesse des loyers, les prix de vente des mètres carrés de bureaux n'auraient pas encore rattrapé ni les niveaux atteints en 2007 ni même les records de 1992. enfin, la profession, qui n'a jamais connu des taux d'intérêt aussi bas, avance en terra incognita. « la prime de risque entre le coût de l'argent et les rendements n'a jamais été aussi forte, ce qui nous aide à garder la tête froide », explique un broker. que se passera-t-il si les taux remontent ? cela n'arrivera pas avant un ou deux ans, avancent plusieurs experts. ce serait le signe de la reprise de la croissance, des besoins des entreprises et donc des valeurs locatives et des rendements, se rassurent les autres.

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Source : www.lesechos.fr